Marché du blé : un « équilibre précaire », selon Agritel
À l’occasion de sa conférence de presse, jeudi 24 août, Argus Media France (Agritel) a partagé son analyse d'un marché « fragile » du blé, entre fortes tensions en blé meunier et afflux de blé fourrager.
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Ce n’est plus une surprise, la récolte de blé tendre française 2023 a été moyenne avec 34,8 Mt estimées par Agritel. Une production qui va répondre aux besoins domestiques et à ceux de l’export, puisque le disponible exportable s’élève à 17 Mt. Toutefois, pour se positionner sur la scène internationale, « le blé français va devoir rester compétitif tout au long de la campagne », a souligné Alexandre Marie, analyste en chef d’Argus Media France, lors d’une conférence de presse jeudi 24 août.
17 Mt à exporter
Ainsi, ce sont 7,5 Mt qui devraient être destinés à l’UE avec des flux soutenus vers l’Espagne et des pays comme l’Allemagne, la Pologne, le Royaume-Uni, qui ont connu, en raison d'aléas climatiques, un fort déclassement de leurs blés meuniers. Néanmoins, cette dynamique va être réduite par les importations en provenance d’Ukraine qui, après la fermeture du corridor maritime de la mer Noire, a trouvé d'autres voies pour exporter sa production.
À destination des pays tiers, ce sont 9,5 Mt qui devraient être expédiées. Mais le blé français devra faire face à la concurrence des blés d’origine mer Noire, notamment sur les marchés historiques du Maroc et de l’Algérie. En effet, par nécessité économique, les importateurs se sont tournés en début de campagne vers le blé russe à prix compétitif.
La Russie démarre en trombe
Avec une production de 88 Mt et un surplus de stock de 10 Mt, la Russie renforce sa place sur l’échiquier mondial. « Elle a démarré la campagne avec des records d’exportations, notamment vers le Maghreb. Toutefois, elle rencontre désormais des difficultés logistiques pour faire partir la marchandise. De plus, les tensions régulières qui menacent la sûreté de la navigation maritime font monter les primes de risques sur les assurances et le coût du fret. Ces facteurs font donc revenir le prix du blé russe au niveau de celui du blé français, qui se positionne de nouveau pour reconquérir les marchés d’exportation », explique Alexandre Marie.
En outre, les accidents de production dus aux aléas climatiques chez les principaux pays exportateurs viennent tendre leurs stocks et ainsi fragiliser l’offre. En effet, l’Argentine, le Canada, les États-Unis et l’Australie sont concernés par des baisses drastiques de leur production. El Niño menace notamment la production australienne à venir. « Cela aura des impacts sur la scène mondiale et pourrait tendre davantage la situation », alerte Alexandre Marie.
« Une lourdeur en céréales fourragères »
Dans un autre registre, la Chine et l'Inde connaissent un déclassement important de leurs blés meuniers à la suite de précipitations importantes lors de la récolte. Un phénomène également rencontré dans le nord de l'Europe ou en Ukraine, où 65 % de la production est déclassée en blé fourrager. « Il y a une lourdeur en céréales fourragères qui vont se retrouver en forte concurrence », analyse-t-il. Mais la Chine pourrait représenter un débouché supplémentaire en blé meunier pour la France.
Ainsi, la disponibilité en blés est fragile et mal répartie géographiquement. L’origine mer Noire concentre près de 40 % des échanges mondiaux de blé. Alors qu’elle est au cœur du conflit russo-ukrainien, cette région devra exporter à plein régime toute l’année pour répondre aux besoins des pays importateurs. « La domination russe va perdurer, mais elle est nécessaire au vu de l’équilibre précaire du marché mondial du blé », souligne Alexandre Marie. Une situation qui constitue un risque d’approvisionnement majeur en cas de discontinuité des chargements.
Le maïs en recours
« Avec la fragilité des disponibilités mondiales de blé, tout aléa climatique et toute instabilité géopolitique pourraient contribuer à réanimer une forte volatilité des cours du blé », prévient-il. Néanmoins, la production de maïs, qui est attendue à un niveau record pour les principaux pays exportateurs, devrait venir soulager la tension sur le blé. « C’est un moyen de limiter l’incorporation de blé mondial dans l’alimentation animale et donc de rationner la demande », conclut-il.
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